Pipal, en fin de carrière...
Pipal est en fin de carrière, il va bientôt quitter la piste. Pendant des années, tous les jours, il a chaussé son nez rouge comme d’autres prennent en main la truelle ou le PC portable. Avec conscience professionnelle, il a voyagé au pays de son enfance, a trouvé au cœur de son âme les mots, les gestes, les yeux pour faire rire les enfants. Il a bien fait son boulot, comme d’autres construisent des maisons ou des plans financiers. Mais au fond de lui, comme d’autres, Pipal a souffert. Il a pris des coups de massue sur la tête, des seaux d’eau dans le dos, des retournements d’échelles, des pétards sous sa chaise et des grandes claques dans la vie …
Et eux qui regardaient, ils ont ri, ils ont tous ri, beaucoup ri, beaucoup trop ri !
Pipal a esquissé un sourire sur la piste … et a pleuré dans sa roulotte.
Pipal a souffert. Comme tant d’autres, il ne s’est pas senti compris dans son métier, ne s’est pas senti reconnu pour ce qu’il était. Toute sa carrière a résonné dans sa tête la voix de sa mère et celle de son instituteur qui criaient, l’une à la maison, l’autre à l’école : ‘Pipal, arrête de faire le clown !’
Pipal avec son maquillage d’éternel sans âge et sans expérience a enfin compris. Pipal arrête, il part à la retraite …
Un jour, peut-être, Pipal trouvera au cœur de son âme les mots d’espoir pour dire son rêve d’un monde où on ne se moque pas de celui qui se prend des gamelles tous les jours de sa vie.
Un jour, peut-être, Pipal trouvera au cœur de son âme les gestes tendres pour ouvrir les yeux des enfants sur la souffrance des petits, des faire-valoir, des sans grade.
Un jour, peut-être, Pipal trouvera au cœur de son âme le moyen de communiquer aux enfants la force d’un regard qui sourit, qui compatit et restaure.
Un jour, peut-être, Pipal trouvera au cœur de son âme, la force de changer un peu le Monde.
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